Selon le dictionnaire robert, l’adjectif classique renvoie au à une œuvre ou à un écrivain qui fait autorité et est digne d’être imité. Dans le cadre de la promotion de la littérature de jeunesse, l’Association Muna kalati a interviewé pas mal d’auteurs de jeunesse africains. Il en ressort que beaucoup d’entre eux ont été familiarisés très tôt aux classiques de littérature de jeunesse occidentale. Entre autres, le petit chaperon rouge, blanche neige, la belle aux bois dormant, les trois petits cochons, pour ne citer que ces exemples. Ceci est tout à fait compréhensible dans la mesure où ce genre a vu le jour dans les contrées occidentales. A titre d’illustration, en France, le premier livre destiné aux enfants serait intitulé : les aventures de Télémaques (1699) de Fénélon.
Au regard de l’analyse des bases de données que nous avons récemment effectuée en Afrique de l’Ouest, la littérature de jeunesse dans les pays francophones ( Côte d’Ivoire, Sénégal, Bénin, Guinée Conakry) a commencé à prendre de l’ampleur dans les années 2000. C’est très loin des chef d’œuvres occidentales des années 1850 avec les frères Grimm , célèbres conteurs en Allemagne ou encore Charles Perrault, connu comme l’un des précurseurs du conte en tant que genre littéraire. Toutefois, l’Afrique n’a-t-elle pas déjà gagné en expérience ? N’est-il pas tant de parler des classiques africains en termes de littérature de jeunesse ? A travers cette réflexion, nous voulons démontrer que l’on pourrait désormais ériger certaines œuvres au grade de classique au plan national et même régional avec pour finalité d’influer davantage sur les pratiques de lecture en famille.
Bref aperçu de l’essor de littérature jeunesse en Afrique
L’industrie du livre pour enfants en Afrique est en plein essor. A l’évidence, il y a de plus en plus de maisons d’éditions exclusivement jeunesse. Des œuvres de qualité sont produites dans chaque pays et remportent des prix. La promotion est au rendez-vous avec les plateformes telles que Takam Tikou, Muna kalati et bien d’autres. Par ailleurs, des collaborations prennent de l’ampleur d’où les coéditions. De plus, des salons autour de la littérature de jeunesse sont organisés dans certains pays pour davantage asseoir son impact. A l’évidence, il y a donc un mouvement d’ensemble depuis près de trois décennies, autour du développement à grande échelle de l’industrie jeunesse en Afrique. Au regard de ce qui précède, il est temps de franchir un autre cap ; mais avant il faudrait faire un bilan stratégique pour accroître l’intérêt pour cette littérature dans les familles.
De la consécration de certaines œuvres jeunesse en Afrique
Il est peut-être temps que l’industrie du livre jeunesse mette un peu plus en avant certaines œuvres jeunesse. En effet, pour que la littérature de jeunesse soit davantage prise au sérieux en Afrique, il faudrait orienter la jeunesse vers les choix de lecture. Chaque état africain pourrait clairement accompagner ce mouvement. Ceci permettra de faire de telle sorte que la lecture soit un réflexe chez les jeunes car ils auront appris qu’à un certain âge, ils devraient avoir lus un certain nombre d’œuvres. Mais avant cette étape importante, un travail de fond s’impose. Il y a une nécessité de faire une enquête sur les œuvres jeunesse les plus consommées, les œuvres ayant le plus marqué les esprits et ceci selon les tranches d’âge et le genre. On peut par exemple s’inspirer de l’approche de l’UNICEF qui, pour sélectionner les meilleures œuvres pour enfants en France en 2023, est passée par une sorte de vote chez les enfants, la principale cible.
Dans cette logique, il est nécessaire que les principaux acteurs de la chaîne du livre jeunesse se mettent ensemble dans chaque pays, pour définir quelles œuvres devraient entrer en compétition pour devenir des classiques de la littérature de jeunesse. Cette entreprise ne vise aucunement à fouler aux pieds les autres productions qui ne seront peut-être pas sélectionnées après le long processus mais plutôt à valoriser davantage les productions africaines de telle sorte qu’on puisse parler ultérieurement de classiques africains de littérature de jeunesse. Déjà, c’est un travail qui semble avoir déjà été fait au niveau de la littérature pour adulte. En réalité, il est désormais possible d’avoir une idée sur les classiques de littérature africaine. A tritre d’illustration, nous avons L’enfant noir de Camara laye; Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma ou encore L’aventure ambiguë de Cheik Ahmidou Kane.
Les attentes et perspectives d’une telle entreprise
Il serait illusoire d’épiloguer sur la question sans impliquer les parents car ils sont un maillon important de la chaîne. Quand ceux-ci s’impliquent vraiment dans l’éducation des enfants, le résultat est très souvent positif. Une fois que les classiques de la littérature de jeunesse seront définis, associé au travail de médiatisation qui va accompagner ce long processus, l’impact sera immédiat.
Source: https://bit.ly/44UrSKU
Les habitudes de lecture seront transmises aux enfants qui seront des futurs parents et ceci de génération en génération. Il est certes vrai qu’ il y a de plus en plus d’auteurs jeunesse en Afrique avec une multiplicité de productions. Toutefois, il est important de d’orienter et de canaliser pour faciliter la tâche aux enfants dans ce trop-plein de productions. Cette orientation sera rendue possible une fois que les classiques de littérature de jeunesse seront définis.
A tout prendre, nous avons épilogué sur la question des classiques de littérature de jeunesse en Afrique qui devraient selon notre vision, être déjà définis au regard de l’essor palpable de cette littérature dans le continent. Nous avons surtout rappelé qu’une telle initiative ne vise surtout pas à amenuiser certaines productions mais à orienter les bénéficiaires de cette littérature et surtout à susciter plus d’intérêt au niveau de la communauté africaine. En le faisant, il y a de fortes chances que l’intérêt pour cette littérature prenne une autre dimension.